mercredi 30 avril 2008

La chasse du Roi Hérode traverse l'Ain

Voici un document que m'avait communiqué André Julliard pour la création d'une bande son pour le Musée Escale Haut Rhône .
Le mot "réprouvé" y est même prononcé pour nommer... celui qui est transporté par le passeur ! Il y a une inversion également en ce qui concerne les chiens. Pour l'indexation, j'ai confondu (provisoirement ?) Hérode avec le diable pour ne pas multiplier les libellés.

Sur la rivière d’Ain, hauteur d’Ambérieu-en-Bugey, témoignage de Cafi, pontonnier (1840) : MONNIER Désiré – Traditions populaires comparées. Mythologie. Règnes de l’air et de la terre, Paris, J.-B. Dumoulin, 1854
Il y a bien quatre-vingts ans que Cafi était pontonnier et le plus intéressant narrateur de Condes. Une nuit qu’il était couché, il est réveillé par les cris : « A la barque, à la barque ! ». La nuit était froide ; on était à la veille de la Fête des Rois, c’est-à-dire précisément au cœur de l’hiver. Il en coûtait au Cafi de se lever ; il aurait volontiers envoyé au Diable l’importun voyageur. Un sentiment d’humanité le rappelle bien vite à son devoir ; il s’habille à la hâte, court à la nacelle et traverse la rivière. Là, se trouvait un grand monsieur, couvert d’un grand chapeau, armé d’un grand fusil, suivi d’une grande meute. Le personnage entre dans le bateau, il y est suivi de ses chiens, qui chargent d’un poids énorme le frêle esquif. Ces quadrupèdes l’avaient déjà tout couvert, qu’il en sautait, sautait, sautait encore, sautait toujours, tant et si bien qu’ils passaient trois cents.
En mettant pied à terre, le généreux passager, désirant récompenser dignement le zèle et le bon cœur du pontonnier, lui remplit la main de pièces d’or. Mais quand l’honnête Cafi, de retour à sa maisonnette, voulut compter les louis qu’il avait reçus, il ne trouva plus dans son gousset que des feuilles de buis ! Il se souvint alors que c’était la veille des Rois et vit bien qu’il venait d’avoir affaire à ce réprouvé d’Hérode.