lundi 26 avril 2010

Xylographie dite de Buxheim, image de dévotion de 1432

Ce qui m'intéressait dans cette image, que j'avais publiée en 2008, c'était tous les détails autour: le moulin, le moine avec la lanterne (c'est l'ermite qui montre le chemin ?), etc. J'avais remarqué que ces éléments étaient aussi sur la fresque de St Sorlin en Bugey, je ne savais pas pourquoi mais une lectrice du blog vient de me donner toutes les explications ou presque et même... une photo convaincante:

J'en profite donc pour réactualiser l'article. Merci à Marianne Gilly-Argoud !
Chercheuse à l'université de Grenoble en histoire médiévale, j'ai travaillé sur la peinture murale de Saint-Sorlin-en-Bugey et puis en effet vous assurer d'un lien très évident avec le dit saint Christophe de Buxheim, une image de dévotion xylographiée datant de 1423 dont un exemplaire a été collé dans un manuscrit de la Bibliothèque de Buxheim, d'où son nom. Le saint Christophe de Saint-Sorlin a été clairement composé et exécuté en suivant fidèlement l'iconographie de Buxheim (jusqu'au moindre détail, les feuilles de l'arbre, les positions de l'ermite et du meunier, l'enroulement de l'eau au pied du saint, etc), véhiculé du Rhin jusque dans le Bugey par la circulation des images de dévotion xylographiée, d'autant que Saint-Sorlin est à la frontière (quand la peinture est exécutée à la toute fin du XVe-début XVIe siècle) des marches de Savoie et du royaume de France.
D'ailleurs, la Vierge à l'Enfant en gloire debout représentée aussi sur le mur de Saint-Sorlin tire aussi sa composition et son iconographie de la xylographie (Nuremberg K7, par exemple).
Pour en revenir au saint Christophe, le motif de l'ermite est tiré de la légende même de la vie du saint, puisque il est le passeur du gué où Christophe rencontre le Christ, la lanterne étant bien sûr un symbole de la révélation divine. Quant au moulin et au meunier avec son âne, c'est un motif repris directement de la xylographie de Buxheim, qui n'a pas de source dans la vie du saint, mais qui correspond à cette volonté, typique de la fin du Moyen Âge, d'ancrer le récit mystique dans la vie réelle quotidienne du fidèle par des éléments familiers, et ce afin de réaliser un processus cathartique d'identification.