Dans " La Légende de la Mort chez les Bretons Armoricains" de Anatole Le Braz, 1922
"Un vieux de Plestin, la rencontra un soir sur les bords du Douron. Elle était assise sur la berge, regardant l'eau couler. Elle venait de Lanmeur qu'elle avait dépeuplé et se rendait dans le pays de Lannion.
- Hé vieux! cria-t-elle, auriez vous l'obligeance de me prendre sur vos épaules pour me faire passer l'eau ? Je vous en récompenserais bien.
Le vieux qui ne la connaissais pas y consentit.
L'ayant chargée sur ses épaules, il entra dans la rivière. Mais, à mesure qu'il avançait, il la sentait peser sur lui d'un poids plus lourd.
A la fin, épuisé, le courant étant très fort, il dit :
- Ma foi, bonne dame, je vais vous planter là. Je ne tiens pas à me noyer pour vous.
- De grâce, ne fais pas cela. Ramène moi plutôt à l'endroit où tu m'as prise.
- Soit.
Et il rebroussa chemin, sans trop de peine, son fardeau s'allégeant à mesure qu'il se rapprochait du rivage.
Le pays de Lannion fut ainsi préservé de la peste.
Mais si le vieux avait laissé tomber la vilaine groach (fée) au beau milieu de la rivière, comme il en avait d'abord eu l'intention, le monde eût été débarassé d'elle à jamais."
Raconté par le père de Anatole Le Braz.