samedi 3 janvier 2015

Ceux de la "Gorgone", Anatole Le Braz

Ce récit m'avait échappé, et surtout il m'avait échappé que je connaissais l'endroit : la traversée du Trieux près de Lézardrieux. A l'entrée du  pont "moderne", j'avais photographié le Saint Christophe dans sa niche vitrée il y a déjà quelques années...
Il y avait là aussi (y est-elle encore ?), d'après Anatole Le Braz, une chapelle St Christophe et surtout un passeur.
Voici ci dessous, ce que raconte Anatole Le Braz dans les "Contes du soleil et de la lune", ici une édition de la Librairie Delagrave (1913, à Paris). Les illustrations semblent être de E.Dutour ?
Vous pourrez trouvez le texte complet, également,  dans Magies de la Bretagne,  pages 787-795, tome 1, Robert Laffont Bouquins, 1994. Une vraie "légende", datée, géolocalisée et racontée par le fils du héros. Résumé :
Le soir du 18 décembre 1869, il y a un brouillard à couper au couteau. Le passeur, Olivier Marker, surnommé Saperlott est remonté chez lui, juste à côté de la chapelle Saint Christophe. Pendant le repas sa fille entend sonner comme un glas, puis la porte s'ouvre et dehors il n'y a personne sauf un grand chien et des cris. Le passeur suit le chien... Quand il revient, bien plus tard, il raconte qu'il a suivi le chien jusqu'à sa barque dans laquelle l'attendaient 12 marins en costumes de service. Ils ont appelé le chien "Korymbo" qui a sauté dans la barque.  Saperlott leur a demandé qui ils étaient. Ils ont répondu qu'ils étaient de la Gorgone et qu'ils voulaient traverser vers Paimpol. Le passeur les a trouvés bien mouillés et pas bien gais pour des permissionnaires. Pas un ne l'a aidé à la manoeuvre non plus, pourtant ce soir là les rames étaient bien plus lourdes que d'habitude. Mais le pire c'est qu'arrivés sur l'autre rive ils n'ont pas payé leur passage. Ils ont juste dit "Dieu te le rende" pendant que leur chien hurlait. Le passeur veut aller voir le commissaire de la marine dès le lendemain à Paimpol pour qu'on lui rende justice. Le lendemain, il confie la barque à ses fils, et part, furieux, à Paimpol. Il revient vite, il est décomposé. Il dit : "L'an prochain je ne serai plus le passeur. La Gorgone a sombré hier , corps et biens, dans les parages d'Ouessant et il y avait 12 Paimpolais dans l'équipage".